Avec 55 000 défaillances d’entreprises (dont 67% d’autoentreprises), l’année 2023 est une année record. La BPCE s’attend à un chiffre bien plus élevé pour 2024 avec probablement 64 000 fermetures, soit près de 43 000 autoentreprises !
Bien que la situation économique, avec l’inflation et certains marchés tendus, soit en partie responsable de ces fermetures, une autre responsabilité est à chercher dans le manque de préparation du projet entrepreneurial. Malheureusement, quel que soit le statut choisi (entreprise individuelle ou société), de nombreux entrepreneurs se lancent sans mettre en place une réflexion stratégique ni plan d’action. Alors forcément, quelques mois à peine après la création officielle de l’activité, certains entrepreneurs dépités, se demandent comment faire pour gagner de l’argent, puis faute de réponse ferment leur structure. Ils apprennent à leur dépens que la simple présence sur un marché, même si l’idée est révolutionnaire, n’aboutit pas forcément à un succès économique.
Pourtant, et bien qu’il n’existe pas de méthode qui fonctionne à tout prix, la rédaction d’un business plan peut éviter bien des écueils. Parce que c’est bien lors de la rédaction du business plan que tout s’écrit : les objectifs, le statut, le produit, le business model, le plan d’action…
Il existe plusieurs raisons à cette absence de réflexion stratégique :
1 – Le business plan a bien été rédigé mais uniquement pour sa partie financière. La partie étude de marché est sommaire et le plan d’action inexistant (si ce n’est la création d’un site internet, des pages social média et des cartes de visite).
2 – L’absence de business plan parce que le porteur de projet est mal (voire pas) accompagné ou préparé, voire qu’il n’estime pas utile ce document ô combien capital pour son avenir entrepreneurial.
En effet, l’accompagnement n’est pas toujours efficace. Là encore plusieurs raisons. Tout d’abord la structure qui accompagne ne recrute pas de personnels (ou bénévoles) compétents et expérimentés. Le business plan est passé à la trappe, ou s’il est rédigé, n’est pas audité.
Ensuite on peut avoir des porteurs de projet non formés à la stratégie, la commercialisation ou la gestion d’entreprise. Ils font le choix de se passer de formation, estimant que leur projet ne le nécessite pas (c’est souvent le cas des autoentrepreneurs).
Enfin, on trouve quelques porteurs de projet imbus et sûrs de leurs compétences qui sont pourtant inexistantes. Ce profil est assez rare mais déjà rencontré.
On peut agir sur plusieurs leviers pour mieux accompagner ces porteurs de projet :
1 – Vérifier les compétences de l’accompagnateur en termes de lecture de business plan et d’expérience professionnelle (de création d’entreprise ou de coaching de projet).
2 – Payer convenablement les accompagnateurs. En échange, il faut absolument avoir une sélection un peu plus efficace de ces accompagnateurs.
3 – Accompagner sur du long terme, c’est-à-dire pendant la rédaction du business plan et quelques mois après la création de l’entreprise. Avoir une réelle planification d’accompagnement !
Mais qui doit payer cet accompagnement ?
Il y a deux formes de paiement. La première, c’est le temps passé par le porteur de projet. Il doit être conscient qu’il va passer du temps sur son projet, quitte à réduire ses loisirs.
Ensuite, il faut payer l’accompagnateur et tous les experts dont on peut avoir besoin (au moins un consultant en stratégie marketing, un comptable et un juriste, ensuite, tout dépend du projet).
France Travail n’a clairement pas les moyens de payer d’accompagnement efficace. Le CPF est truffé de faux experts incompétents, y trouver les bons relève de l’exploit, même s’il y en a. Les associations sont parfois opérationnelles et bénévoles. Leur qualité se voit dans les programmes qu’elles mettent en place et le profil des accompagnateurs. Certaines ont assez bonne réputation. Certaines chambres consulaires paient assez mal leurs accompagnants externes, alors on peut avoir des doutes sur la qualité des prestations, l’expérience ou la motivation du prestataire. Évidemment, cela ne veut pas dire que tout est à jeter. En effet, leurs collaborateurs internes peuvent être des pépites. Les structures privées sont souvent assez opérationnelles, il vaut mieux parce qu’elles ont une activité commerciale : si l’accompagnement est défaillant, les payeurs (qui sont les grandes entreprises, les financeurs privés et les porteurs de projet eux-mêmes) partiront.
Alors qui paie ? Tout dépend du projet et des moyens. Si le porteur de projet en a les moyens, il est évident qu’il devrait d’abord privilégier les structures privées.
La création d’entreprise est bénéfique pour l’économie mais aussi pour les individus : elle les rend plus heureux dans 81% des cas (étude Vistaprint) et équilibre la vie professionnelle et la vie personnelle (notamment celles des mampreneures).
Proposer un accompagnement efficace et sur la durée peut s’avérer un atout pour les individus mais aussi pour l’économie. Alors arrêtons de bâcler ce travail et soyons sérieux dans l’accompagnement que l’on propose aux porteurs de projet.
Sources :
https://solutions.lesechos.fr/business/actu-entreprise/2023-quel-bilan-pour-l-auto-entreprise/
https://www.banque-france.fr/fr/statistiques/entreprises/defaillances-dentreprises-dec-2023
https://www.erudit.org/fr/revues/ipme/2017-v30-n1-ipme03058/1039789ar/
https://www.lecese.fr/sites/default/files/pdf/Etudes/2020/2020_24_femmes_entrepreneuriat.pdf